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Séparés par des virgules

Explorer les articulations entre migrations, formation et justice sociale

Une équipe angevine de l’unité ESO (Espaces et sociétés) est associée au programme de recherche européen Skills4Justice, qui s’intéresse aux pénuries de compétences qui touchent certains pays, ainsi qu’au potentiel de différents partenariats pour remédier à ces pénuries dans les pays d’origine et de destination des migrants.

Fin 2024, plus de 500 000 emplois sont vacants en France. Plusieurs secteurs sont particulièrement impactés par des difficultés de recrutement : la restauration, l’agriculture, les services à la personne… Pourquoi ces pénuries existent-elles ? Dans un contexte de migration mondiale de la main-d’œuvre, des personnes d’autres pays pourraient-elles occuper ces postes ? Sont-elles formées ? Comment les recruteurs se positionnent-ils dans de tels cas ? Voici quelques-unes des interrogations qui traversent le projet européen Skills4Justice. Piloté par l’université Vytautas Magnus, à Kaunas, en Lituanie, il associe des établissements de cinq pays membres de l’UE (France, Allemagne, Italie, Pologne, et, donc, Lituanie) ainsi que six pays non-membres (Turquie, Royaume-Uni, Norvège, Macédoine du Nord, Ukraine, et Éthiopie).

Deux équipes françaises sont mobilisées : des économistes, qui travailleront sur des statistiques, et des géographes et sociologues angevins de l’unité ESO (Emmanuel Bioteau, Richard Gaillard, Samuel Delépine, Margaux Verove, enseignants-chercheurs, et Joanne Walker, ingénieure de recherche).

L’un des objectifs de Skills4Justice est « d’observer, analyser les jeux d’adaptation ou d’inadéquation entre les besoins d’emplois des pays recruteurs et la formation des migrants, résume le directeur d’ESO, Emmanuel Bioteau, professeur de géographie sociale à l’UA, qui a travaillé ces quatre dernières années sur l’insertion du public très éloigné de l’emploi, dans le cadre du programme La Locomotive. Il y a un deuxième objectif pour les pays émetteurs de main-d’œuvre : vérifier si les compétences acquises à l’extérieur font l’objet d’un transfert de compétences vers le pays d’origine ». « La notion de justice inscrite dans le nom du projet est importante, complète Joanne Walker. Le système de valorisation des compétences peut représenter une forme de justice sociale pour les personnes migrantes ou non migrantes ».

Un zoom sur deux secteurs

Afin de comprendre les pratiques et stratégies des acteurs de l’emploi vis-à-vis du recrutement, et du public migrant en particulier, l’équipe angevine va mener deux grands chantiers. Il s’agira notamment de réaliser une grande revue de littérature sur les thèmes de l’emploi, de la formation et des migrations, « en portant une attention particulière sur les gens et les effets des politiques publiques sur ces personnes », souligne Emmanuel Bioteau.

En parallèle, une série d’entretiens va être menée auprès des acteurs de l’emploi et de la formation. « Nous avons fait le choix de nous concentrer sur les secteurs de la santé et des services à la personne », explique Samuel Delépine, maître de conférences en géographie sociale, qui travaille, entre autres, sur l’accueil des migrants au niveau local.

D’une durée de 3 ans, le projet Skills4Justice devrait livrer ses premières conclusions fin 2026. Il est financé à hauteur de 3,5 millions d’euros par l’Union européenne, dont 270 000 pour l’Université d’Angers.

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